La révolution numérique transforme le milieu culturel. Création, diffusion, communication : les outils numériques sont partout. Or, leur usage n’est pas sans conséquence. Le numérique, bien qu’immatériel en apparence, a une empreinte écologique significative. À l’heure où la transition écologique devient urgente, une question se pose : comment concilier innovation technologique et responsabilité environnementale dans le secteur culturel?
Une empreinte bien réelle
Le numérique représente aujourd’hui environ 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Cette part est appelée à croître rapidement avec l’expansion du streaming, des objets connectés et de l’intelligence artificielle (IA). Loin d’être neutre, chaque page web consultée, chaque vidéo visionnée, chaque requête traitée par un serveur consomme de l’énergie, souvent issue de sources non renouvelables.
Contrairement à l’idée reçue, passer au numérique ne signifie pas automatiquement polluer moins. Il s’agit d’une autre forme de consommation, plus invisible, mais tout aussi concrète.
L’IA : un outil puissant, à utiliser avec discernement
L’intelligence artificielle est aujourd’hui utilisée dans plusieurs sphères de la culture : génération d’images, d’univers sonores, rédaction assistée, automatisation de tâches. Ces outils peuvent stimuler la créativité et faire gagner du temps. Mais ils sont énergivores, notamment lors de leur entraînement initial et, dans une moindre mesure, à l’utilisation.
Pour minimiser leur impact, vous pouvez :
- privilégier des outils d’IA plus légers ou localisés,
- éviter les usages excessifs ou superflus (par exemple générer des centaines de visuels inutilisés),
- explorer des plateformes qui misent sur une infrastructure plus économe.
Éco-concevoir sa présence numérique
Un site web ou une plateforme culturelle peut avoir une empreinte carbone importante, surtout lorsqu’il intègre de nombreuses vidéos, animations ou ressources non optimisées. L’éco-conception web propose des principes simples :
- alléger les images et vidéos,
- réduire les animations inutiles,
- héberger son site chez un fournisseur utilisant des énergies renouvelables,
- concevoir des interfaces simples, accessibles et fonctionnelles.
Par exemple, la Ville de Laval a intégré une démarche de développement durable dans la refonte de son site web. La municipalité souligne avoir misé sur l’écoconception afin de réduire l’empreinte environnementale du site, qui est désormais 50 % moins énergivore.
La diffusion numérique : repenser nos habitudes
La diffusion en ligne — concerts, webinaires, performances, expositions virtuelles — s’est imposée comme une solution agile et accessible, particulièrement depuis la pandémie. Mais cette solution a un coût environnemental.
Le streaming vidéo, en particulier, est extrêmement énergivore. Il repose sur des serveurs puissants et des réseaux de transmission qui fonctionnent 24 heures sur 24. À cela s’ajoute l’usage répété d’équipements numériques, souvent peu durables ou difficilement réparables.
Des solutions concrètes sont possibles :
- offrir des replays en résolution réduite,
- éviter la surproduction de contenus audiovisuels inutiles,
- encourager la mutualisation d’équipements numériques,
- choisir des plateformes d’hébergement responsables.
Quelles actions concrètes pour les artistes et les organismes?
Il n’est pas nécessaire d’être spécialiste du numérique pour amorcer un virage écologique. Plusieurs actions simples peuvent avoir un impact réel :
- Auditer son site web et ses outils numériques pour identifier les éléments à alléger
- Réduire la résolution des vidéos et éviter les contenus superflus
- Choisir des fournisseurs et outils éthiques et écoresponsables
- Se former ou former son équipe à l’éco-conception et aux pratiques numériques durables
- Intégrer des critères environnementaux dans la planification des projets numériques
Plusieurs ressources en ligne permettent d’identifier des outils et fournisseurs numériques plus durables. Par exemple, la Green Web Foundation propose un répertoire d’hébergeurs alimentés par des énergies renouvelables, tandis que le collectif Green IT met à disposition des guides pratiques et un éco-index pour évaluer l’impact environnemental de son site web. Des plateformes comme Sustainable Web Design offrent des conseils techniques en éco-conception, et Framasoft propose des alternatives éthiques aux outils numériques commerciaux (formulaires, visioconférence, hébergement collaboratif). Enfin, des fournisseurs comme Infomaniak ou ceux listés dans le Green Hosting Directory se démarquent par des engagements environnementaux clairs. Ces ressources sont précieuses pour faire des choix éclairés et durables dans vos projets numériques.
Vers une culture numérique responsable
La culture peut être un moteur de changement. Elle a le pouvoir d’inspirer, de sensibiliser, d’ouvrir de nouvelles perspectives. Il ne s’agit pas de rejeter la technologie, mais de l’utiliser avec lucidité et cohérence.
Penser le numérique autrement, c’est aussi défendre une culture plus durable, plus accessible, et plus en phase avec les défis de notre époque.
Si vous êtes intéressé·e par ces enjeux ou souhaitez amorcer une démarche numérique plus durable, n’hésitez pas à me contacter à numerique@culturemonteregie.qc.ca — je serai heureuse d’échanger avec vous.